Mange gras et tais-toi !

Publié le par Kiki

Il y a de cela quelques mois, mon cher et tendre me racontait en détail, par téléphone, le régime effectué par un de ses collègues de travail, à savoir la chrono-nutrition.

Au programme de ce formidable instrument destiné à équilibrer l’alimentation : une prise de nourriture riche le matin avec un petit-déjeuner typiquement anglais comprenant fromage et charcuterie, beaucoup de viande et de féculents le midi et enfin, le soir, du poisson à volonté. Ce qui semblait fortement réjouir Mr Kiki, qui pensait que les régimes imposaient de se sustenter à coup de rondelles de poireaux, de tofu à la vapeur et de poisson sans sauce.

Evidemment les détails ne nous étaient guère fournis, mais c’est avec force détermination que nous avons pris la décision de tester ce fabuleux régime avec comme grand intérêt la possibilité d’accéder à deux jokers par semaine : à savoir craquer et manger ce que l’on désire.

Sauf que, par acquis de conscience et souhaitant effectuer correctement les choses, j’ai pris la peine d’acheter le formidable bouquin du Dr Delabos et de le lire. Bien entendu, pour justifier son prix et son format, ce charmant Monsieur prend la peine de nous expliquer, pendant quelques dizaines de pages, les raisons qui l’ont poussé à créer la chrono-nutrition ainsi que toutes les mauvaises habitudes alimentaires dont on devra se débarrasser (comme si on ne savait pas que grignoter constamment, manger gras le soir, boire à outrance et ne consommer qu’une seule famille d’aliment, pouvait nuire à notre santé).

Bref, en remerciant mentalement le gentil Monsieur qui se donne le temps de me réexpliquer ce que les magazines de mode, les émissions culinaires et les médecins ne cessent de rabâcher depuis plusieurs d’années, je poursuis ma lecture afin d’arriver au plus vite aux raisons qui m’ont amenée à dépenser une vingtaine d’euros ; le programme de cette révolution gastronomique.

Et c’est là que le bât blesse : le matin il faut manger très gras… Et pas une petite tartine de pain avec du beurre et du fromage. Non… 70 grammes de pain, 20 grammes de beurre et (accrochez-vous) : 100 grammes de fromage (presque un demi camembert tous les matins).

Le premier jour, consciencieusement, j’attrape ma petite balance, les ingrédients de mon gavage d’estomac matinal et j’aligne devant moi, sur une assiette, le grammage exact de mon petit-déjeuner. Pour une fille qui a passé une dizaine d’années à ne boire qu’un thé en se levant, la transition est douloureuse. Surtout que mon ventre ne crie guère famine…

Mais je suis prête à suivre à la lettre les instructions de Mr Delabos afin de corriger toutes mes orgies alimentaires douteuses. Me voilà donc en train d’engloutir, à 8h00 du matin, ma quantité de lipide journalière tout en me rassurant sur les bénéfices futurs de ce programme. Sauf que, arrivée à la moitié de mon marathon nutritif, je sens mes organes digestifs protester. Les bouchées suivantes me rappellent avec effroi les scènes les plus abominables d’un reportage sur la fabrication du foie gras. Je m’imagine, telle une oie, à la veille de Noël, le bec ouvert, attendant patiemment la bouillie qui se déversera dans mon gosier et fera de moi le bonheur des réveillonneurs.

Bref, c’en est trop, j’arrête avant de dégurgiter. Mais un problème cornélien se pose à moi : si je ne respecte pas les quantités requises, est-ce mal ? Mais si je finis par dégobiller, est-ce pire ?

La même question se dresse à midi. En effet il faut manger 240 grammes de viande rouge ou 280 grammes de viande maigre, ainsi qu’un bol de féculent. Pour moi qui aime picorer différentes saveurs, ici ni entrée, ni salade, ni fromage, ni dessert. Devant mes deux côtes de porcs dodues et ma ration de poix cassés, mon appétit se calme rapidement. Mais, mieux disposée que le matin, j’arrive à finir mon assiette et j’en suis fière. Sauf que, le petit comté fruité, que j’ai acheté au marché quelques jours avant, me fait sacrément de l’œil lorsque j’ouvre le frigo. Je résiste et me fait couler un expresso, afin d’avoir l’impression de varier les sensations culinaires. Sauf que, le café nature, quand on est une inconditionnelle du sucre, c’est plutôt désagréable au goût. La cigarette que j’allume parvient à me redonner un sentiment de normalité : enfin une perception connue…

Et voilà qu’arrive le moment tant attendu de la journée : le goûter et là… Que du bonheur : 2 verres de jus de fruit ainsi que 3 carrés de chocolat noir ! Ah, enfin du plaisir ! Ce moment est tellement espéré que je prends facilement 30 minutes pour le manger.

Le soir, par contre, aucune difficulté ne se pose sur le menu (sauf sur les quantités exorbitantes recommandées de poisson ou de viande maigre), mais j’ai du mal à abandonner l’idée de manger mon petit bout de fromage, de boire un thé sucré en dégustant quelques morceaux de nougat fraîchement ramené de Montélimar…

La première journée est finie, je n’ai pas craqué, mais je sens comme une frustration intérieure au moment du coucher…

 

Lors de l’utilisation de mon premier joker, j’ai pu voir à quel point les restrictions des jours précédents m’avaient pesées… En effet, j’ai commencé le repas en servant des petits fours, poursuivi par un plateau de makis et fini par une mousse au citron, bien évidemment en arrosant tout cela copieusement. J’avais pu me retrouver maître de ma cuisine pendant quelques heures et le résultat était là : nous nous sommes régalés. Mais devant tant de débauche alimentaire, une question se pose… Suis-je vraiment aussi frustrée par cette chrono-privation, euh, excusez-moi : chrono-nutrition ? La réponse s’impose en promenant mon regard sur les gamelles dégarnies et l’accumulation de bouteilles vides (rassurez-vous, j’avais des invités ce soir là).

Autre problème au restaurant. J’ai toujours détesté ces femmes (ou hommes, ne soyons pas sectaires) qui, dès le début de la commande insistent pour enlever la moitié des composants du plat pour les remplacer par des choix les satisfaisant mieux. C’est exactement ce que j’ai fait ce midi. Et je n’en étais pas fière… « Excusez-moi, quel est l’accompagnement du faux-filet ? … Mmm, pourriez-vous enlever la ratatouille et les courgettes et ne mettre que des pommes de terres ? » « Qu’avez-vous en dessert ? … Mmm, serait-il possible de… En fait non, j’avais oublié, je ne prends rien…. Si ! Un café sans sucre ! (oh joie…) ».

Dernier problème, l’arrivée à la caisse quand nous effectuons les course de la semaine… Parce que, en calculant bien, 1400 grammes de fromage, 3640 grammes de viande, 3780 grammes de poisson et tout le tralala, ça fait rapidement monter la note… Et ça donne forcément à réfléchir…

 

Me voilà dans une spirale infernale ou chaque soir, je me félicite intérieurement d’avoir tenu bon, et chaque matin, je me lève en ayant une désagréable impression de déjà vu en enfournant ma première bouchée de fromage beurré au pain…

Vous connaissez Une journée sans fin ? Voilà mon quotidien actuel…

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C
Pouah les tofu, je ne les supporte pas du tout ! Heureusement que le régime chrononutrition existe, c’était un véritable calvaire de se limiter à des feuilles de laitue et du blanc d’œuf à<br /> midi ! Mais les bons régimes ne sont pas bons marchés ! SI on veut se nourrir convenablement alors il faut y mettre le prix !
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L
Depuis quand tu es obligee de faire un regime toi? Tu veux perdre un os? Allez courage, l'automne arrive, une bonne soupe et au dodo...ou une raclette? Mouahaha!!!
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L
Eh bien je te trouve bien courageuse... je préfère mon pain nutella du matin...
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K
<br /> Bas les pattes, tentatrice !!!<br /> <br /> <br />
K
Héhé ^^
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C
Et non pas "une journée sans faim" !!
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